dimanche 28 février 2010

A la mémoire de Clara et Rosa

Clara Z. et Rosa L. en 1910

Il y aura cent ans le 8 mars prochain, Clara Zetkin - ici avec sa copine Rosa Luxemburg - a l'idée d'une journée internationale des femmes afin de militer pour le droit de vote, l'égalité entre les sexes et le socialisme, idée qu'elle fait adopter au cours de la deuxième Conférence internationale des femmes socialistes à Copenhague.
Une tapée d'événements est évidemment prévue pour ce centenaire, que je vous laisse le soin d'aller chercher par vous-mêmes sur la Toile. A mon modeste niveau, je dédicacerai l'album collectif "En chemin elle rencontre" le vendredi 5 mars à partir de 11h en gare de Lille, face à la voie 16 très exactement - à l'invitation des cheminotes de la région Nord-Pas de Calais  ; et le lundi 8 mars, à partir de 16h à l'Espace Traversière, 15 rue Traversière, 75012 Paris. Après quoi, on pourra se rendre directement au point de départ de la manifestation féministe de Paris/Ile de France, prévue à 18h30 place de la Nation.

lundi 15 février 2010

Le Vampire ou "Merci, Monsieur Sander"

Lorsque je commence la création des personnages de "Vampire" en novembre 2008, je me retrouve confrontée à la même difficulté que pour "le Docteur Petiot" : faire coexister, et rendre crédibles sur la feuille, des personnages réels - pour lesquels je dispose ou non de documents d'époque - et des personnages fictifs.

Je trouve quelques photos de Peter Kürten, en petit nombre, non datées et passablement contradictoires quant à l'aspect réel du meurtrier : était-il maigre ou gros, moustachu ou non ?


 

 

Caprice et ironie d'internet : ce n'est qu'après avoir fini l'album que je découvrirai un document fiable - c'est-à-dire daté et à l'endroit.


Je glane quelques photos de victimes : Maria Hahn, Frau Meiner, qui n'apparaît pas dans l'album, la petite Gertrude Albermann...


Après une recherche pointue pour découvrir le nom du maire de Düsseldorf à l'époque des faits - eh oui, qu'est-ce que vous croyez ?... - je mets la main sur ce magnifique portrait de Robert Lehr - en effet, c'est son nom.


Mais reste encore à faire naître toute une ribambelle de visages pour autant de personnages réels ou fictifs.

J'ai la bonne idée de me souvenir alors qu'August Sander (1876-1964), cet immense photographe, a travaillé en Allemagne précisément dans ces années-là et dans la région de Köln, ville toute proche de Düsseldorf. Sa collection de portraits d'enfants, de femmes et d'hommes allemands est restée sans équivalent dans l'histoire de la photographie. Son but était d'"offrir par le moyen de la photographie une image absolument fidèle de notre époque" (l'époque en question allant quand même de l'empire aux débuts de l'Allemagne fédérale). Répartis selon les différentes catégories socio-professionnelles, quatre cent trente et un de ces portraits sont réunis dans le beau livre "Hommes du XXe siècle", publié au Chêne en 1980.

Et c'est ainsi qu'une jeune mère prêtera ses traits à la jeune femme du cinéma,













qu'un ingénieur et un forgeron de Wuppertal m'inspireront respectivement les inspecteurs Meister et Müller,


 


qu'une paysanne de Westerwald deviendra Eva Flake,













qu'un jeune paysan endossera le rôle de Strausberg, un gérant celui du commissaire principal,






























qu'un industriel de Düren et un jeune homme serviront de modèles pour le rédacteur en chef du Düsseldorfer Anzeiger et son assistant, 
 














qu'une jeune paysanne campera Maria Budlich,


et que deux avocats de Köln seront l'un le président du tribunal et l'autre l'avocat du Vampire.


Toutes les photos d'August Sander © Schirmer/Mosel
Extraits de l'album Le Vampire, scénario Rodolphe, couleurs L. Yerathel © Casterman

Est-il utile d'ajouter que j'ai une véritable vénération pour August Sander, à mes yeux un des plus grands portraitistes du siècle dernier ? Merci, Monsieur Sander.

samedi 6 février 2010

Le Vampire, ou "Merci, Monsieur Murnau"

Comme je l'indiquais dans mon premier billet sur ce nouvel album, le scénariste Rodolphe place d'emblée le criminel Peter Kürten, plus connu par son surnom de "Vampire de Düsseldorf", sous le signe d'un autre vampire : Nosferatu. Le plus simplement du monde : l'histoire commence dans une salle de cinéma où est projeté le "Nosferatu" de Murnau. C'est l'occasion pour moi de voir enfin ce grand classique du cinéma muet, que je ne connais que par le remake qu'en a fait Werner Herzog en 1979, avec Klaus Kinski dans le rôle titre.

La page 1et les deux suivantes citent littéralement quelques plans de la fin du film. Munie des indications du scénario, je repère ces plans, et photographie les arrêts sur image. Certes, j'aurais pu faire des captures d'écran, mais prendre des photos, c'est plus rigolo.


 

  

 
Nosferatu, une symphonie de la terreur
de F. W. Murnau

Passer du cinéma à la bande dessinée n'a rien d'évident : ces photogrammes ont tous la même taille et les mêmes proportions, ce n'est pas le cas des cases de BD ; il faut les agencer ensemble sur une seule planche, qui plus est la première. Je tâtonne donc un peu.


 

  
 © Jeanne Puchol

Cette troisième version nous convient. Je l'agrandis pour la reporter sur la feuille au format définitif, puis procède à l'encrage du dessin ainsi obtenu.

 

Reste à procéder à la mise en couleurs pour obtenir la page telle qu'elle apparaît dans l'album.

couleurs : L. Yérathel
© Casterman

Outre la figure du vampire - "Nosferatu" est une adaptation du "Dracula" de Bram Stoker -, le film situe l'époque : il date de 1922, Rodolphe n'a donc pas hésité à imaginer que notre sinistre personnage retourne le voir en 1928, année où démarre notre histoire. Il permet enfin de débuter l'album avec un double huis-clos - celui du cinéma, celui de la chambre où se déroule la scène - qui instaure d'emblée une atmosphère bien oppressante.
Pour moi, cela a été un grand plaisir de dessiner ces cases d'après des plans pratiquement fixes - c'est souvent le cas des films muets - et tous magnifiquement composés... Merci, Monsieur Murnau.